Est-ce une perte de temps de redoubler sa classe?

Combien de parents d’élèves sous la pression de leurs rejetons avancent des prétextes les plus complaisants du genre : « le petit est très intelligent ; mais cette année, il s’est un peu trop amusé parce qu’il avait une mauvaise compagnie. Je suis convaincu que s’il passe en classe supérieure, il s’en sortira sans problème ; il a pris conscience de son erreur et il veut se racheter

. D’ailleurs, je lui trouverai un moniteur afin de combler ses lacunes pendant les grandes vacances etc. » ou encore : « il est préférable de le laisser passer pour redoubler en classe d’examen » Il est assez fréquent de nos jours que des parents d’élèves soudoient des professeurs ou des membres de l’administration afin de donner un petit coup de pouce au « pauvre petit ».

 

Le pauvre petit quant à lui, va tout droit au but pour accuser tel prof de lui en vouloir à mort parce qu’ils se seraient « croisés » un jour chez une camarade de classe ; ou tel autre prof qui lui a collé injustement un zéro alors que c’est son voisin qui perturbait le cours par ses bavardages etc. En d’autres termes, le petit est un génie mais …

Toute cette gymnastique visant à remettre en cause le verdict du conseil de fin d’année est sous-tendue par l’idée largement répandue selon laquelle, « Redoubler » une classe est une perte de temps. Les élèves en général ne vont pas aussi loin dans leur analyse : ils ont plutôt la hantise d’être « lâché » par leurs compagnons de classe et de se faire rattraper par les « petits » des classes précédentes qu’ils traitaient de corbeaux ou de veaux ; et surtout de se faire démasquer par les fillettes qu’ils mystifiaient par des x et y etc. Certains élèves préfèreront changer carrément d’établissement afin d’échapper à ces regards moqueurs et accusateurs. Leurs meilleurs alliés dans cette démarche sont généralement les parents qu’ils manipulent comme leurs jouets: des parents prêtent une oreille particulièrement attentive à leurs plaintes relatives à de prétendues brimades que leur feraient subir des profs animés d’esprit de vengeance ; ils ne s’imaginent pas que leurs « bébés » ont grandi. Ils continuent à soutenir des arguments du genre : «Mon bébé ne sait pas ce que veut dire mentir et encore moins inventer de pareilles monstruosités » D’autres soutiennent leurs fistons parce qu’ils ont tout simplement peur d’eux. Pour eux, il s’agit donc d’arracher leurs fistons des griffes de tortionnaires.

Redoubler sa classe n’est nullement du temps perdu . C’est bien au contraire, gagner du temps sur l’ensemble du parcours scolaire de l’élève: redoubler est le signal d’alarme indiquant que vous être sur une pente glissante. Vous n’avez pas le minimum de bagages nécessaires pour vous permettre d’aller aussi loin que vous le souhaitez. Rappelez vous que votre souhait est d’aller le plus loin possible dans vos études(niveau Doctorat). Pour atteindre ce grand objectif, il vous faut un minimum de bagages intellectuels par niveau depuis la maternelle. Le système est tel que plus vous êtes « chargé », plus vous êtes à l’aide durant le parcours. Si à une étape donnée et pour des raisons diverses les encadreurs se rendent compte que vous n’avez pas le minimum exigé pour continuer le parcours, trois choix se présentent à eux :

- Premièrement : prononcer votre exclusion : votre bagage est si infime qu’il est à reconstituer et non pas à compléter. Il s’agit pour vous de repartir à des niveaux inférieurs pour reconstituer ce minimum.

- Deuxièmement : vous faire reprendre votre classe

Votre bagage est en deçà du seuil mais sans atteindre le niveau critique ; la nécessité de compléter votre « charge » s’impose : c’est une opportunité qui vous est offerte pour charger non plus le minimum nécessaire mais plutôt le maximum pour la suite du parcours. Les conseils de fin d’année vous aident à faire le point à chaque étape de votre parcours. Plus cette évaluation est rigoureuse et objective, mieux cela vaut pour vous. Les professeurs qui s’amusent à vous donner des notes de complaisance pour vous faire passer en classe supérieure, vous condamnent à un échec certain. Ils ne vous rendent pas service mais plutôt vous confinent dans la médiocrité.

-Troisièmement : vous laisser passer à un niveau supérieur.

C’est là une décision suicidaire pour vous. Le système est tel que pour commencer à charger les bagages d’un niveau donné, il faut au préalable être chargé du minimum de bagages du niveau précédent. Vous pouvez « forcer » le passage avec toutes les complicités possibles mais sachez que cette « jonglerie » ne saura durer éternellement car inévitablement se dressera devant vous la classe d’examen : il faut faire ses preuves et ce sont des évaluateurs inconnus de vous qui sont chargés de la tache. La réussite à l’examen est indispensable à la poursuite du parcours. Première tentative ? Echec ! « C’est accidentel ! ça arrive même aux meilleurs de la classe ; c’est une question d’émotion, dit-on ! » Deuxième tentative ? Echec ! « Pas de chance ; les épreuves portaient sur les rares chapitres que j’ai négligés ! » Troisième tentative? Echec! « Tout le monde sait qu’ il y a trop de magouilles aux examens dans ce pays! Les correcteurs ne corrigent en fait que quelques copies sélectionnées ; comme nous autres, on ne connaît personne, on ne sera jamais admis! Pourquoi perdre mon temps d’ailleurs? Combien d’illettrés ont parfaitement réussi dans ce pays? » etc. Ainsi s’arrête le parcours de notre « brave » qui a voulu défier les lois de la nature .